En matière d’infractions routières, la peine de confiscation du véhicule peut avoir des conséquences ressenties comme plus sérieuses que des peines comme l’amende ou l’emprisonnement avec sursis, compte-tenu de la valeur ou de l’utilité dudit véhicule.
Alors que cette sanction pénale est en général facultative, elle devient obligatoire dans certains cas, ce qui signifie que la juridiction devra la prononcer expressément mais sans avoir à la motiver. A l’inverse, la non-confiscation devra faire l’objet d’une décision spéciale et motivée, ce qui doit conduire le prévenu à justifier de sa demande de non-confiscation.
1. Dans quels cas la confiscation du véhicule est-elle obligatoire ?
Les hypothèses dans lesquelles le Code de la route ou le Code pénal prévoit la confiscation obligatoire du véhicule peuvent être regroupées en deux catégories.
En premier lieu, cette peine s’appliquera au délinquant routier qui persiste dans son comportement malgré un avertissement préalable.
D’une part, tel est le cas de celui qui outrepasse une décision faisant obstacle à la conduite qui lui a pourtant été notifiée (article L.224-16, II, 1° du Code de la route).
D’autre part, la confiscation obligatoire est prévue en cas de commission, en état de récidive légale (au sens des articles 132-10 et 132-11, alinéa 2, du Code pénal), des infractions suivantes : conduite en état d’ivresse ou refus de se soumettre aux épreuves de dépistage (article L.234-12, I, 1° du Code de la route), conduite sous stupéfiants ou refus de se soumettre aux vérifications y afférentes (article L.235-4, I, 1° du Code de la route), dépassement de la vitesse maximale autorisée de plus de 50 kilomètres/heure (article L.413-1, II, 1° du Code de la route), fait de contrevenir à l’interdiction de conduire un véhicule non-équipé d’un éthylotest anti-démarrage électronique (article L.234-16, III, du Code de la route).
En second lieu, la peine de confiscation obligatoire concerne la commission par le conducteur de plusieurs infractions, regroupées au sein d’une seule ou dont certaines constituent les circonstances aggravantes d’autres.
D’une part, la confiscation obligatoire s’applique au délit prévu à l’article L.221-2-1 du Code de la route, créé par la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016, réprimant la conduite sans permis correspondant à la catégorie du véhicule considéré tout en faisant usage d’un permis faux ou falsifié.
D’autre part, il en va de même des infractions d’homicide ou de blessures involontaires commises par un conducteur (articles L.232-1 et L.232-2 du Code de la route et 221-8, 10° et 222-44, 13° du Code pénal) lorsqu’elles sont aggravées par certaines circonstances (alcool, stupéfiants, grand excès de vitesse,…).
2. A quelles conditions la confiscation obligatoire peut-elle s’appliquer ?
Toutes les dispositions relatives à la confiscation obligatoire posent deux conditions au prononcé de cette peine.
En premier lieu, le véhicule faisant l’objet de la confiscation obligatoire ne peut qu’être celui « dont le condamné s’est servi pour commettre l’infraction » (par exemple, article L.224-16, II, 1° du Code de la route), à l’exclusion donc d’autres véhicules dont le condamné pourrait être propriétaire.
En second lieu, le condamné doit être propriétaire du véhicule. Le fait qu’il en ait eu la libre disposition ne suffit pas à prononcer cette peine.
La juridiction doit donc constater cette propriété. Cela étant, la Chambre criminelle de la Cour de cassation ne censure pas les juges du fond qui ont omis de relever cet élément dès lors qu’elle peut s’assurer elle-même que le condamné était bien propriétaire du véhicule (Cass.crim, 18 novembre 2014, n°13-88340). A ce titre, sans être une preuve irréfragable, le nom inscrit sur la carte grise constitue un indice utilisé par les juges quant à l’identité du propriétaire (par exemple, CA Caen, 8 décembre 2009, n°09/00337).
La démonstration par le prévenu que le véhicule appartient à un tiers permettra d’éviter le prononcé de la peine de confiscation obligatoire. Néanmoins, si le véhicule est sous main de justice au moment de l’audience de jugement, dès lors que « nul ne plaide par procureur », il n’appartient en principe pas au prévenu de solliciter la restitution du véhicule. Le tiers propriétaire devra intervenir au procès pénal pour en faire la demande, quand bien même n’a-t-il pas été convoqué à l’audience.
Par ailleurs, il n’est pas inutile de préciser que lorsque le véhicule appartient à une société, la confiscation obligatoire du véhicule est exclue lorsque seule la personne physique, salarié ou dirigeant, est poursuivie.
Enfin, lorsque le véhicule appartient à plusieurs personnes (hypothèse de l’indivision), la circulaire d’application du 6 juillet 2011 (NOR : JUSD1118695C) estime que peut s’appliquer, conformément au droit commun, la peine de confiscation obligatoire. Cependant, la circulaire omet de rappeler que le droit commun de la confiscation protège les intérêts des tiers de bonne foi qui pourront donc faire valoir leurs droits devant la juridiction de jugement.
3. Est-il possible d’éviter la peine de confiscation obligatoire ?
Si les conditions d’application de la peine de confiscation obligatoire sont réunies, le prononcé de cette peine peut encore être évitée. Toutes les dispositions relatives à la confiscation obligatoire précisent que « la juridiction peut toutefois ne pas prononcer cette peine, par une décision spécialement motivée » (par exemple, article L.224-16, II, 1° du Code de la route).
Cette règle constitue la spécificité de la peine de confiscation obligatoire. L’exigence de motivation de cette peine complémentaire (notamment Cass.crim, 1er février 2017, n°15-85199) est renversée. La motivation est nécessaire, non pas en cas de confiscation, mais en cas de non-confiscation.
4. Comment motiver sa demande de non-confiscation ?
Dès lors que la juridiction de jugement devra rendre une décision « spécialement motivée » si elle n’entend pas infliger la peine de confiscation obligatoire, le prévenu doit fournir aux juges les arguments pertinents.
La circulaire d’application du 6 juillet 2011 invite tout d’abord les juridictions à appliquer les critères classiques de l’article 132-24 du Code pénal qui, dans sa version en vigueur à la date de la circulaire, étaient les suivants : circonstances de l’infraction et personnalité de son auteur, conciliation entre « la protection effective de la société, la sanction du condamné et les intérêts de la victime » d’une part, et « la nécessité de favoriser l’insertion ou la réinsertion du condamné et de prévenir la commission de nouvelles infractions » d’autre part.
La même circulaire ajoute que peuvent être pris en compte les charges et revenus du prévenu dès lors que la peine de confiscation revêt une nature patrimoniale. Elle mentionne aussi les incidences possibles de la confiscation sur les conditions de vie des proches du condamné.
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